La participation, qui était l’un des enjeux phares de ce scrutin, a fortement progressé au second tour des Régionales, atteignant 58,5%. Pourtant, certains ont décidé de ne pas se rendre aux urnes. Défiance vis-à-vis de la classe politique ? Absence de candidat crédible à leurs yeux ? Nordpresse est allé à la rencontre de l’un d’entre eux pour tenter d’en savoir plus.
« Je voulais aller voter, je vous le jure », affirme Claude, employé municipal qui vient de souffler ses 48 bougies. « A la base, j’avais prévu d’y aller le matin, pour être tranquille et éviter la foule. On sait l’affluence qu’il peut y avoir pour ce genre d’évènements… Et puis là-dessus je suis passé dans la rue devant les photos des candidats, y avait un qui ressemblait vraiment à un veau, et du coup je me suis souvenu que je devais aller acheter du gigot pour le déjeuner.
Ma femme avait invité ses parents (elle a de ces idées, parfois), donc c’était très important de faire bonne figure. Mais je vous raconte pas le monde qu’il y avait dans la boucherie… Sans doute tous ceux qui avaient prévu d’aller voter l’après-midi ! En plus Madame Yvonne racontait sa vie au boucher comme à chaque fois. Bon, il faut la comprendre, hein, le mari de la concierge de sa coiffeuse s’était tiré avec le fils de la cousine de Monsieur Bernard du 4ème… Ensuite c’était le tour du vieil Alphonse, qui n’a plus toute sa tête depuis que sa perruche est morte, et qui était persuadé d’être à la poste. Le temps de lui expliquer que non, il ne pouvait pas expédier cette côte de bœuf à sa nièce qui habite dans le Morbihan, ça nous a pris trois bons quarts d’heure. Alors évidemment, quand ça allait enfin être à mon tour, le boucher a annoncé qu’il fermait. Donc moi, vous voyez, j’étais bien embêté. Déjà que les parents de ma femme n’ont pas une très bonne opinion de moi…
Du coup je suis rentré bredouille et on a dû leur faire des Croustibat. Alors forcément, ils étaient pas très contents. Et là, j’ai dû annoncer qu’il n’y avait plus de vin car mon beau- père avait fini la dernière bouteille, sa cinquième, alors qu’on en était toujours à l’entrée. Du coup il ont poussé des grands cris, se sont demandé ce qu’ils avaient fait au ciel pour que leur fille finisse avec un pignouf pareil… C’était pas dit méchamment, vous savez, mais je l’ai pas très bien pris, d’autant que j’étais moi-même sur le point de finir ma troisième bouteille, alors j’ai envoyé un vase dans la tête à ma belle-mère. Là, comme ça, PAF (il imite le geste).
Donc bref, tout ça a fini à l’hôpital, puis aux pompes funèbres quand on a vu qu’il n’y avait rien à faire, et enfin au poste quand mon beau-père a décidé de me dénoncer. Il devrait me remercier, quoi, depuis le temps qu’il me parlait de quitter cette peau de vache ! Mais moi, je voulais toujours voter, je vous jure. Accomplir mon devoir de citoyen. Mais je suis resté toute la nuit en garde à vue. Finalement mon beau-père est venu ce matin expliquer qu’en fait je n’y étais pour rien, que sa femme avait trébuché, donc ils m’ont laissé partir, mais bon je suis quand même un peu dégouté.
Oubliez tout ce qu’on vous dit à la télé et dans les journaux : selon moi, le taux d’abstention c’est à cause des flics et des belles-mères. »