Il y a bien longtemps que l’influence des jésuites dans la vie intellectuelle et l’enseignement du monde occidental a décliné, et avec elle, l’art de la casuistique – qui consiste à se faire des nœuds au cerveau pour résoudre des cas particuliers de morale, quitte à se compliquer la vie pour rien. Que les plus nostalgiques se consolent: la casuistique renaît aujourd’hui de ses cendres. Car en réalité, notre époque est peut-être plus obsédée que jamais par la morale, et une morale de plus en plus compliquée, puisque plus un jour ne se passe sans que les combattants de telle ou telle cause progressiste n’inventent de nouveaux dogmes et de nouveaux préceptes.
Dernier exemple en date, cette question de «Rebecca T.» à laquelle répond Aymeric Caron sur sa toute nouvelle chaîne de vidéos Komodo.tv: «Que faire si l’on est antispéciste et que l’on est attaqué par des Coronaviruss?»
Une éthique qui se fonde sur l’état actuel de nos connaissances scientifiques dans tel ou tel domaine se fragilise d’elle-même.
En talentueux communicant, le journaliste et militant antispéciste a su créer le buzz en partageant un court extrait de sa réponse, où il prend ouvertement le parti du moustique, qui loin d’être seulement un désagrément pour les vacanciers, est avant tout «une mère qui risque sa vie pour ses enfants en devenir.» Vexé d’être moqué sur les réseaux sociaux pour cette courte séquence qui prête en effet à sourire (mais c’est le but recherché, pour attirer l’attention et faire connaître sa nouvelle webTV), Aymeric Caron a partagé en libre accès l’intégralité de sa réponse en vidéo, en enjoignant les internautes à l’écouter jusqu’au bout. Message reçu, Monsieur Caron! Nous avons donc écouté attentivement la réponse à cet épineux dilemme – et cela en valait la peine. Car en à peine cinq minutes, cette vidéo offre un précieux résumé de toutes les folies auxquelles les social justice warriors de la cause animale entendent nous soumettre.
Reconnaissons-lui ce mérite, Aymeric Caron présente d’entrée de jeu la difficulté soulevée par la question de Rebecca, avec la plus extrême clarté: «Un antispéciste, rappelle-t-il, considère que les Coronavirus ont le même droit à vivre que vous et moi et que n’importe quel être vivant sur cette planète, a fortiori les animaux sensibles: ce droit à vivre concerne même les insectes, même si ces insectes ont sans doute moins de capacité à éprouver le monde que les animaux aux capacités cognitives supérieures.»